«C'est ma femme qui m'a informé de la possibilité de s'enregistrer comme donneur de moelle osseuse, elle-même y était déjà. Comme je suis donneur de sang et de plaquettes, elle disait que ce serait bien d'aller au bout de la démarche. C'est très simple, il suffit de prendre rendez-vous dans un Établissement français du sang (EFS) près de chez soi, de remplir un questionnaire, une prise de sang, et l'on entre dans le registre. Ca prend une demi-heure.
Dès lors qu'on est inscrit, on sait qu'on peut être appelé à tout moment. Pour moi, ça a été en septembre 2014. J'ai été informé par courrier et par un appel que mon profil génétique était potentiellement compatible avec celui d'un malade. On m'a refait une prise de sang pour vérifier la compatibilité. En dehors des membres de votre famille, il n'y a qu'une chance sur un million pour qu'un individu soit compatible avec un autre! Mais le nombre d'inscrits reste insuffisant: 250.000 en France, c'est très marginal par rapport aux 2000 malades en attente d'une greffe chaque année.
Ensuite, j'ai dû me rendre au tribunal de grande instance pour attester auprès d'un huissier que je comprenais à quoi je m'engageais. Il existe deux modes de prélèvement des cellules hématopoïétiques, et l'on donne son accord pour les deux. Ils sont sans risque. Au final, c'est le médecin qui choisit ce qui est le plus adapté pour le receveur. Dans mon cas, elles ont été recueillies par prélèvement sanguin (aphérèse). C'est moins contraignant que le prélèvement par ponction dans les os postérieurs du bassin, qui nécessite deux jours d'hospitalisation. Les quatre jours précédant le jour J, j'avais des rendez-vous quotidiens avec un infirmier qui m'injectait un produit permettant de faire remonter les cellules de l'os vers le sang. Je n'avais pas d'autres consignes si ce n'est peut-être de ne pas consommer beaucoup d'alcool pendant cette période mais comme je suis marathonien, j'ai l'habitude faire attention à mon hygiène de vie.
«Je pense beaucoup à lui»
Le 28 janvier, le jour J, je suis allé à l'hôpital Henri-Mondor à Créteil où j'ai été très bien accueilli par l'équipe du Pr Beaumont. Le prélèvement a duré 4 heures, alité. Je n'ai pas eu à rester davantage à l'hôpital mais j'étais arrêté deux jours car il arrive qu'il faille revenir le lendemain, si un nombre insuffisant de cellules a été prélevé. Les jours qui suivent, on se sent un peu moins énergique, comme un état grippal.
Je suis cadre commercial et n'ai jamais eu de contact particulier avec le monde médical qui aurait pu me sensibiliser à cette cause mais je vois ça comme un acte citoyen naturel. Je n'ai pas hésité un instant. Il suffisait de se mettre 5 minutes dans les baskets du receveur: si j'avais un cancer, j'aimerais que quelqu'un soit là pour moi dans le monde [les registres nationaux sont communalisés au niveau mondial, NDLR]. Je ne connaîtrai jamais le receveur mais cela ne m'empêche pas de penser beaucoup à lui. J'espère qu'il s'en est tiré. Tout ce que je sais de lui, c'est que c'est un homme de ma tranche d'âge. Le don est anonyme, et gratuit bien sûr, mais j'ai la possibilité de lui écrire. J'y ai déjà beaucoup réfléchi cet été car je souhaite le faire, mais ce n'est pas facile car il faut observer une certaine retenue.